Projet de loi pour la médiation à Genève: les grands axes
En répondant présent à l’invitation de la FGeM à intervenir lors de son assemblée générale le 6 février dernier, le Conseiller d’Etat Mauro Poggia s’est montré fidèle à son engagement pour la mise en œuvre de l’article 120 de la Constitution genevoise relatif à la médiation. Il a présenté les grands axes du projet de loi en préparation pour améliorer le processus de renvoi en médiation des litiges par le pouvoir judiciaire.
La justice, au sens premier, n’est pas pour Mauro Poggia l’apanage du pouvoir judiciaire. 30 années de pratique du métier d’avocat l’ont amené à constater que les décisions judiciaires peuvent être « dévastatrices ». Il déplore ainsi l’insuffisance du dispositif législatif instaurant la sensibilisation à la médiation nécessaire avant toute procédure judiciaire et la possibilité du renvoi en médiation des litiges qui s’y prêtent.
« La médiation est la voie à suivre »
Le projet de loi en préparation concerne les litiges en matière civile. Il s’attache à définir l’art et la manière d’orienter vers la médiation les dossiers judiciaires qui peuvent l’être. Pour le Conseiller d’Etat, la formation obligatoire des juges et des avocats aux spécificités de la médiation rendra la démarche plus fluide. Il s’agit notamment de clarifier les rôles des différents intervenants concernés ainsi que de distinguer la conciliation de la médiation. Plus fondamentalement, l’enjeu identifié par Mauro Poggia consiste à réduire les réticences de certains avocats et magistrats à l’égard de la résolution extrajudiciaire des conflits.
Le second axe de l’encouragement de la médiation s’appuiera sur l’existence de médiateurs référents au sein des institutions. A cet égard, on peut pressentir l’instauration d’une structure de permanence.
Pour justifier la mise en place de ces mesures structurelles, en termes de coûts notamment, le troisième volet du dispositif législatif prévoit un suivi statistique des renvois en médiation et de leurs résultats.
Le projet de loi ne devrait en revanche pas définir les modalités de reconnaissance du statut de médiateur, question laissée aux bons soins des associations professionnelles. Le Conseiller d’Etat ne s’est ainsi pas prononcé sur les divergences existantes entre les actuels critères d’assermentation des médiateurs par le Conseil d’Etat et ceux qui reflètent l’accréditation par les différentes associations de médiateurs. Sur ce point toutefois, il a indiqué prendre bonne note des remarques formulées par les médiateurs présents.
Très concrètement, afin de favoriser l’adhésion au nouveau dispositif par le plus grand nombre, Mauro Poggia tient à s’appuyer sur les résultats d’une consultation qui vient d’être lancée auprès des médiateurs, du pouvoir judiciaire et des avocats. L’objectif du Conseiller d’Etat est de proposer au Grand Conseil, au plus tard en septembre 2020, des dispositions législatives qui complèteront les lois actuelles sur l’organisation judiciaire et sur la profession d’avocat.
L’ambition affichée est de faire de Genève un précurseur suisse en matière de règlement extrajudiciaire des litiges, dans la direction prise par la Commission européenne pour l’efficacité de la justice en matière de médiation.
Pour mémoire, l’article 120 de la Constitution genevoise de 2012, intégré à la section relative aux principes applicables au pouvoir judiciaire, prévoit que « l’Etat encourage la médiation et les autres modes de résolution extrajudiciaire des litiges ». Afin que ce principe ne reste pas un vœu pieux, la motion 2449 adoptée par le Grand Conseil le 25 janvier 2019 donne mandat au Conseil d’Etat d’élaborer un projet de loi « ayant pour but de [le] mettre en œuvre de manière effective et efficace, en s’inspirant notamment du projet pilote mis en place par le Tribunal d’arrondissement de Lausanne en avril 2017 et prévoyant dans certains cas la gratuité de la procédure de médiation (art. 218 al. 3 CPC) ».